Comment tuer la créativité: leçon Nº2: Les mettre en cognitive overload



L’anti-management met régulièrement en garde sur le fait que même les têtes les plus uniformisées sont tout de même des cerveaux différents et tous actifs...s’ils ont le moindre temps pour penser. Donc pour vraiment limiter la production d’idée, il faut ne pas leur laisser la place de naitre. Il suffit de polluer massivement le cerveau, s’assurer qu’il est dans un état de surchauffe, d’embouteillage permanent. Surtout ne pas laisser le moindre interstice pour qu’une idée s’y glisse. Quelques méthodes efficaces pour cela:


      1. Abrutissez-les de travail

Très simplement, il faut que chacun sauf vous ait une quantité astronomique de travail. Arrosez-les de tâches très chronophages (rédiger des énormes rapports, vérifier des centaines de chiffres, etc) et imposez des délais extrêmement courts qui vont les obliger à focaliser toute leur attention dessus. Maintenez cette pression en rappelant en permanence le temps qu’il leur reste et en leur demandant d’accélérer. Astuce, privilégiez des échéances les lundi matin ou en retour de vacances afin de vous assurer de leur liberté d’esprit inexistante.

Evidemment la notion d’horaire est à oublier dans l’anti-management, les 35h étant adaptées pour un mi-temps et la notion des « heures de bureau » étant effacée depuis l’invention du blackberry. Petite astuce utile pour éviter les problèmes d’URSSAF : assurez-vous d’avoir des contrats de travail « forfaits cadres »vous permettant de justifier le nombre d’heure par la « flexibilité »et les fameux « RTT » que vous aurez soin de les obliger à poser quelques jours avant les grosses deadline, vous assurant ainsi qu’ils les passeront à travailler ou les perdront en toute conscience.

De même pour les pauses, notion qui doit être inexistante, deux astuces d’anti-management pour les supprimer consistent à mettre la machine à café dans votre bureau, sous la liste des dossiers urgent, ou bien à vous déplacer dès que vous entendez qu’une personne prend une pause pour lui demander où elle en est de ses projets en retard.

Ils ne pourront plus marcher vite, il faudra sprinter dans une frénésie croissante.


      2.  Créez des pics de stress :

Ajoutez ensuite de manière sporadique, et d’autant plus que les deadline fatidiques se rapprochent, d’autres tâches « urgentes » et « très importantes », Cela leur ajoutera des montées d’adrénaline régulière. Si besoin (pour des anti-managers débutant) utilisez les excuses du client pressé, de l’opportunité à saisir ou simplement de leur promotion prochaine pour justifier l’accélération et la charge supplémentaire.

Pour encore augmenter leur surchauffe cognitive, et éviter qu’une tâche devenue « routinière » ne leur laisse la possibilité de réfléchir – car « Réfléchir, c’est déjà désobéir », assurez-vous que votre équipe soit toujours en difficulté dans l’exécution de ses tâches. Dans ce but, l’anti-management recommande la rétention d’information : sous couvert de confidentialité, ne partagez rien qui puisse les orienter puis reprochez-leur soudain de n’avoir pas pris en compte telle ou telle information pour les faire transpirer de peur. 

Ou au contraire partagez des informations nombreuses mais contradictoires, en évitant soigneusement de répondre à leur questionnement, de manière à ce qu’ils paniquent quand vous leur demandez où ils en sont, ce que vous ferez régulièrement.

Si besoin lorsqu’ils se plaignent du rythme, rappelez froidement que s’ils veulent aller voir ailleurs, l’ANPE est juste à côté. 


 3. Noyez leur cerveau

Enfin, l’anti-management vous encourage à ajouter encore de la pollution à leurs cerveaux déjà en surchauffe : il faut systématiquement empêcher votre équipe de se concentrer et court-circuiter leurs pensées régulièrement. Pour cela, en plus de les mettre dans un environnement bruyant et plein de mouvement (inspirez vous des trading floor à l’ancienne), interrompez-les en permanence pour des raisons aussi diverses qu’absurdes.  L’idée est simplement de les couper dans leur élan productif « quel jour serons-nous mardi prochain ? », « vous savez qui a pris le courrier ? ». 

Pour corser encore la gymnastique intellectuelle, adressez-vous à eux avec énormément de détail, sautez du coq à l’âne, parlez très rapidement, coupez vos phrases au milieu, contredisez-vous etc. Et demandez s’ils ont bien tout retenu. Leur pauvre cerveau sera complètement perdu.

Pour l’achever, lorsque vous leur donnez des instructions, ayez des listes à rallonge de choses à faire sans aucun lien. L’exemple de Miranda Presley dans l’excellent film « Le Diable s’habille en Prada » est édifiant. Bien évidemment, vous saurez les punir s’ils oublient le moindre élément. Leur cerveau sera en déconfiture de stress.



Vous pourrez alors être à peu près certains qu’ils ne pourront connecter que les neurones que vous leur demandez d’activer pour exécuter vos ordres. Ce qui devrait vous laisser l'exclusivité de la production d'idées.

Comment tuer la créativité : leçon Nº1: Maintenir un environnement uniforme et asceptisé




S'il existe une menace sérieuse à l'Anti-Management, c'est bien la créativité. Ce concept abject qui permet à votre équipe d'avoir des idées qui ne viennent pas de vous, de penser d'autres manières de faire que la vôtre ou même d'imaginer une autre existence que celle que vous lui faites vivre. Cette créativité doit être systématiquement et âprement combattue par un bon anti-manager. Nous avons donc décidé de vous livrer quelques principes pour vous y aider.

La première grande recommandation de l'anti-management pour tuer la créavitié est de mettre en place un environnement et une équipe d'un conformisme à toute épreuve. Voici quelques pratiques avérées pour y parvenir.


1. Entourez vous de clônes conditionnés

Le premier ennemi à abattre pour éviter toute créativité est bien entendu la diversité. Commencez par le plus évident, votre équipe.
Il est important lors du recrutement que vous vous assuriez qu’ils aient tous le même bagage culturel et intellectuel, afin qu’ils pensent exactement la même chose…que vous. On recommande pour la France des jeunes d’un milieu plutôt aisé (qu’ils n’aient pas connu de difficulté est souvent gage de moindre créativité), bons élèves, qui ont fait une grande école, votent au centre (pas de convictions), sont de tendance catholique (mais pas fervents), de culture bien Française sur plusieurs générations (pas de vie à l’étranger), et évidemment de même sexe et de même orientation. L’anti-management recommande de privilégier les hommes, cela favorise la compétition. Evitez les régions aux cultures trop fortes et extraverties comme le Pays Basque, ou la Provence qui pourraient avoir envie de montrer d’autres façons de parler que la vôtre, préférez la région Parisienne et plutôt l’Ouest.  Fuyez comme la peste les parcours originaux, les entrepreneurs ou artistes en tout genre.

Pour vous assurer une plus grande uniformité de pensée et d’action et les lobotomiser rapidement, recrutez autant que possible des jeunes qui soient déjà bien conditionnés à rechercher la reconnaissance et la réussite. Les fameux « underconfident-overachiever », parfaits petits soldats prêts à bien s’aligner. D'un point de vue pratique, il est clair que vous serez le/la seul(e) abilité à trier les CVs, déterminer les critères (totalement subjectifs) de recrutement, et décider de qui a le privilège de rejoindre votre équipe. Un peu de mauvaise foi peut aider à faire passer certains choix qui pourraient sembler trop arbitraires: "Malgré son CV brillant il a été très mal à l'aise pendant l'entretien, il est donc incapable de tenir le stress, on ne le prend pas". 

Si, hélas, pour des histoires de quotas ou autre erreur de recrutement, il arrive qu’on vous impose de travailler avec un collaborateur qui ne soit pas vôtre clone, rendez lui la vie impossible (cf articles « Comment tuer votre équipe en 10 Leçons » et virez le dès que possible.


2. Enfermez-les dans un grand nombre de règles strictes

Prenez le temps de formater vos équipes pendant quelques mois en leur imposant un cadre de pensée et des méthodes de travail aussi strictes que précises. Leurs schémas de raisonnement doivent devenir parfaitement identiques. Nous recommandons l’ouvrage du « Pyramid Principle » de Barbara Minto ou autres ouvrages aux nombreux « framework » permettant de bien enfermer leurs pensées dans un cadre uniforme.  Leurs outils de travail doivent également être des cases pré-fabriquées qu’ils n’ont qu’à remplir scrupuleusement et scientifiquement avec les informations récoltées. Allez jusqu’à minuter leur tâches, surveiller leurs déplacements et leur imposer des horaires extrêmement précis. Il va de soi que vous leur imposez aussi un dresscode. Nous suggérons le port d’un costume noir avec une fine cravate noire, avec une marge d’acceptation d’une chemise bleu pâle sur un pantalon noir le vendredi. Pas de jupes ni de talons hauts pour les femmes si il y en a. Inspirez vous de l'armée (Impériale en particulier) pour ce volet là, les grades et distinctions en moins évidemment. . 

Vos collaborateurs doivent ainsi devenir parfaitement interchangeables, et comprendre qu’ils ne sont qu’un être vivant jetable remplissant un poste bien plus important qu’eux, une sorte de robot intelligent (que les anti-managers ont tous hâte que la science développe, cela nous évitera des prudhommes) dont le rôle consiste à tout sauf à produire des idées qui sortent des cases à remplir.



3. Créez un environnement de travail parfaitement aseptisé

Ensuite, pour vous assurer que ces idées n’auront pas lieu de germer faute d’arrosage, assurez-vous également de maintenir un environnement de travail aussi impersonnel, froid et aseptisé que possible, où la seule différence d’un bureau ou « cubicle » à l’autre sera le nom sur la petite plaque de la porte. L’environnement idéal pour cela est composé d’un grand plateau bordé de longs couloirs parallèles aux bureaux identiques entourant un open space en « grille » où chacun est enfermé dans la même petite boite au mobilier identique.
Le tout dans une grande tour d’acier et de verre, dans des étages suffisamment haut pour qu’il n’y ait vu que sur le ciel ou d’autres tours, avec des couleurs dans des tons gris que l'on retrouve partout, de la moquette aux parois, une luminosité artificielle blafarde et l’absence totale de décoration ou autre plantes, stupide suggestion néo-écolo qui ne fait que distraire le regard, avec le risque non-négligeable de provoquer la naissance d’une idée.


Même si cela ne suffit pas à tuer toute forme de créativité comme nous le verrons dans les prochaines leçons d’anti-management, vous aurez ainsi l’assurance d’un cadre et d’une équipe aussi stérile que possible en idées. Car les idées, il n'y a que vous, l'anti-manager, qui devez en avoir. Votre équipe devra vite le savoir.